Festival International du Court Métrage 2023

Festival International du Court Métrage 2023

Chaque année, c’est avec un enthousiasme toujours plus grand que je me plonge dans le Festival International du Court Métrage de Clermont-Ferrand, et avec un enthousiasme encore plus grand que j’en ressors.
J’ai visionné, cette année, cinq séances : quatre séances jeunesse – ECO1, ECO3, E et EVAC2, ainsi que la séance I1 du programme International.

J’aurais bien aimé proposer une vidéo de retours de séances, mais le temps manque. J’ai apporté ma modeste contribution à la couverture du festival par un petit reportage pour Radio Campus Clermont-Ferrand au sujet des trois premières séances que j’ai vues : ECO1, ECO3 et la fameuse séance E.

Ce reportage a été diffusé dans l’émission « A court de souffle » du mercredi 1er février, à 17h : ICI, sur le site de Radio Campus !

Et maintenant, quelques mots sur les pépites qui ont ravi mon cœur et mes mirettes durant ce festival, séance par séance. Je ne serai donc pas du tout exhaustive, le but étant de partager mes coups de cœur.

Au menu :

La séance E : aquarelle et verdoyance, séparations et retrouvailles

La séance E, c’est la séance gratuite pour toute la famille, adaptée aux enfants à partir de 4 ans – gratuite, mais il faut bien réserver ses places à l’avance.

Cette année, la séance E s’est ouverte avec L’air de rien, une œuvre de Gabriel Hénot Lefèvre coproduite par Folimage et Gebeka Films. Ce premier film est une grande réussite. De toute la séance, dont l’ensemble est de grande qualité, c’est L’air de rien qui a été le plus retenu par les spectateurices (j’ai des soucis avec l’écriture inclusive, vous remarquerez. Parfois oui, parfois non, et à ma manière. Je ferai peut-être un billet là-dessus, un jour lointain…). Plébiscité par les petits et les grands, cette histoire « du papi et de la mouette » a beaucoup ému. Pour ma part, j’apprécie particulièrement que l’on propose des personnes âgées comme protagonistes. On pourrait dire beaucoup de choses à ce sujet, tout comme sur l’importance d’amener les spectateurs à s’identifier aussi à des héroïnes, et pas seulement à des héros mâles. En l’occurrence, nous sommes en sympathie et empathie avec ce vieux monsieur qui s’ennuie dans sa maison de retraite, qui se sent diminué et infantilisé. Dans cette adversité grise, sa capacité d’émerveillement s’anime lorsqu’il s’agit de prendre soin d’une mouette.

L’air de rien a remporté, à l’issue du festival, le prix du Jury Jeune de CANAL+ Kids, sa treizième récompense. Le jury était composé des classes ULIS et FLE du collège La Charme. Le film sortira au cinéma le 5 avril.

Deux réalisatrices étaient présentes lors de la projection, à qui l’on doit deux des perles de cette séance.

Colocation sauvage est réalisé par la clermontoise Armelle Mercat-Junot. C’est l’histoire d’une chèvre enthousiaste et astucieuse qui décide de construire sa maison dans la jungle. Deux frères tigres décident de profiter de l’aubaine, mais ils ne sont pas vraiment d’accord sur la marche à suivre. Un récit prenant avec des personnages hauts en couleurs !

La réalisatrice iranienne de Our Photo Memento, Samaneh Lashgari, était présente également. La petite mamie et le petit papi qui tentent de traverser leurs cadres de photo pour se rejoindre ont ému et amusé les enfants et leurs parents.

Le tout petit voyage d’Emily Worms, produit par Folimage, participe à la thématique séparation-(re)trouvaille récurrente dans cette séance. « Jean est témoin d’une chose extraordinaire : Titi, sa perruche, peut ouvrir la porte de sa cage ! Pourtant l’oiseau ne part pas. En essayant de comprendre pourquoi, Jean se retrouve embarqué dans un monde magique. Titi va pouvoir montrer ses failles et peurs, et Jean l’aidera à les surmonter. En traversant d’étonnants paysages, ils enrichiront leur amitié et apprendront que dire au revoir, ce n’est pas dire adieu. »

Il s’agit encore d’un film que j’aimerais pouvoir montrer à mes élèves ! J’espère qu’il sera disponible en DVD, comme d’autres films produits par Folimage. Je viens d’ailleurs de faire l’acquisition du DVD de Vanille de Guillaume Lorin, la pépite du festival de 2021.

Bruit rose, deuxième film de la séance, inaugure la luxuriance poursuivie par Le tout petit voyage et Colocation sauvage. « Une interprétation symbolique et poétique de la vie qui grandit dans le ventre d’une future mère », qui offre une succession d’images symbiotiques et hybrides colorées que les jeunes ont appréhendée comme un clip musical.

La reine des renards de Marina Rosset a touché également les enfants et leurs parents. On ne se lassait pas de voir ces mignons renards fureter dans la nuit à la recherche de lettres d’amour à reconstituer.

Je n’ai pas eu le plaisir de voir la séance ECO2, mais j’en ai entendu parler. Des tresses de Leïla Macaire a reçu le prix coup de cœur Canal+ Kids. Entre deux Sœurs, produit par Folimage aussi, a aussi beaucoup plu.

Des tresses : « Lili arrive en CM1 dans une nouvelle école et se lie d’amitié avec Dado. Alors que la photo de classe approche, Lili se fait faire des tresses africaines et Dado se défrise les cheveux. C’est l’occasion de chercher en l’autre quelque chose qu’elles n’ont pas, quitte à mettre en danger leur amitié. »

ECO1 : ça conte pour moi !

ECO1 est l’une des deux séances, avec EVAC1, adaptées aux enfants à partir de 3 ans. Trois ans, cela reste à mon avis trop jeune pour aller au cinéma, surtout pour une séance d’une heure et demie. Les séances ECO1 et EVAC1 sont de nature, tous les ans, à plaire à toutes et tous, et même aux ados ! Ma fille de 11 ans les visionne toujours avec grand intérêt, tout comme moi.

Mon prix de l’originalité pour cette séance revient à Naeris (Le Navet), film estonien de Silja Saarepuu et Piret Sigus, inspiré d’un conte slave. L’image est réalisée à partir de textiles divers et de broderie. Le monde de la surface est présenté en noir et blanc tandis que le monde dans la terre fourmille de vie et de couleurs. Les petites bêtes grouillent autour du navet semé par les jardiniers. La racine brille pour eux comme le soleil souterrain des Mondes engloutis. La taupe et le rat ont des têtes vraiment étranges voire un peu trop effrayantes à mon goût, mais certains petits enfants les ont trouvé rigolos et mignons.

Le deuxième conte de la séance est issu du monde des hérissons. Dans Pourquoi les arbres perdent leurs feuilles à l’automne ?, le papa hérisson raconte à son enfant la légende des arbres radins et du houx généreux pour expliquer la chute des feuilles. La vérité scientifique est ensuite rétablie ! Contes et faits scientifiques ont tous leur importance et leur domaine de validité, et ce peut être l’un des beaux messages de cette jolie histoire.

J’aurais bien aimé voir l’autre film de la réalisatrice Pascale Hecquet présenté au festival, inclus dans le programme de la séance EVAC1 : Pourquoi la neige est blanche ?, où l’on retrouve nos deux insectivores à piquants.

Les courts métrages Lost Brain (Perdre la tête) d’Isabelle Favez et Hello Stranger de Julia Ocker recèlent une dimension métaphorique qui a échappé aux plus jeunes, mais pas aux adultes qui y ont été très sensibles. Les enfants en ont tout de même été amusés.

L’héroïne de Lost Brain est une dame crocodile assez âgée. Elle tombe malade : quand elle éternue, c’est comme si elle perdait à chaque fois un peu plus son cerveau. A chaque éternuement, un objet de son quotidien devient blanc et son usage est oublié. Madame Crocodile finit par évoluer dans un environnement en noir et blanc où les objets qui lui étaient familiers sont devenus étrangers. Elle est aussi désorientée que son cerveau est perdu. Heureusement, elle trouve dans la pratique et dans l’écoute de la musique un remède et une ancre dans la réalité. Son cerveau reprend peu à peu sa place.

La séance E de 2021 proposait déjà un beau film sur le thème des maladies neurodégénératives : Souvenir de Cristina Vilches Estella et Paloma Canonica.

Quant à Hello Stranger, les plus grands peuvent reconnaître tout de suite que le cosmonaute-bébé navigue dans un utérus. On se doute que l’atterrissage sera compliqué !

Le dernier et plus long film de la séance ECO1 a souvent été l’un des préférés des spectateurices : Luce et le rocher de Britt Raes.

EVAC2 : la jeune fille et la mer

Tout comme la séance E, EVAC2 (séance 7+) a proposé un programme excellent. Seul le film Le garçon et l’éléphant de Sonia Gerbeaud m’a laissée mitigée, malgré un qualité technique certaine qui en fait une œuvre agréable à suivre.

La séance s’ouvre avec une légende de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Ursula Ulmi, dans Idodo, nous raconte comment les poissons des récifs ont acquis la diversité de leurs couleurs et de leurs formes. Encore un film que j’aimerais retrouver pour le montrer à mes élèves !

Moules-frites de Nicolas Hu m’a rappelé un peu Vanille en raison de son format, de sa durée (une petite demi-heure) qui lui permet de développer une narration plus « classique », et de l’ensemble de ses qualités. Moules-frites raconte l’histoire inspirante d’une jeune fille qui rejoint sa mère sur une île bretonne. Logée dans le bâtiment du restaurant de moules-frites où sa mère travaille, Noée rêve de participer, avec une nouvelle amie, à la régate organisée tous les ans sur l’île. Malheureusement, les cours de voile coûtent cher ! Noée fera quelques rencontres décisives qui lui permettront d’approcher son nouveau rêve.
Personnages attachants, belles images qui me rappellent mes vacances en Bretagne… On a envie bien envie d’y revenir et d’y rester.

Avec Suis mes pas de Nils Balleydier, on passe de la grâce des voiliers à la grâce des pratiquants du Tai Chi Chuan. Lorsque ces pratiquants sont des étourneaux par dizaines qui imitent les mouvements savants de Théo et de sa petite sœur Chloé, cela prend une tournure particulièrement pittoresque.

No Time For Love de Gabriella Coumau évoque l’angoisse de la relation, la crainte d’être indigne d’amour. J’apprécie toujours quand l’image mêle des techniques différentes au service de la narration, en l’occurrence du stop motion un peu saccadé, en couleur,  et du dessin animé fluide en noir et blanc.

Mame Sélémane Dieye et Laurent Yannick Dorego nous offrent un beau film sur la solidarité avec Mawbé.
Etienne Husson a adapté l’album jeunesse Le peintre des drapeaux, qui nous parle, avec des mots et des couleurs si simples, de l’absurdité de la guerre et de l’hypocrisie des États. Le texte est très beau et constituerait un bon support de mémorisation et de mise en voix poétique.
Le très drôle Boom clôt la séance. On se marre franchement comme des baleines. Sans rire jaune non plus, les humain-e-s écrasé-e-s par la charge mentale s’y reconnaîtront.

ECO3 : de la phirigolosophie et de la graviluminosité

ECO3, ça fait rire et ça fait surtout réfléchir les jeunes collégiens. Prévue pour les enfants à partir de 11 ans et destinée particulièrement aux élèves de 6e et 5e (mais intéressante pour TOUT LE MONDE ; on ne le dira jamais assez), elle a abordé cette année des thèmes tels que la mémoire et la Shoah avec le très beau The Record (Le Disque) de Jonathan Laskar ; le handicap, la solidarité et l’amour fraternel avec Oasis de Justine Martin ; l’homosexualité et l’acceptation de soi avec Jean est tombé amoureux de Romain Roellet ; le conformisme et la tyrannie avec Louis 1er roi des moutons, l’un des deux films assez humoristiques de la séance avec Code Rose, le film pacifiste où des nuées de flamants roses viennent à bout d’installations militaires en mer.

J’ai été déçue par Metamodernity, qui avait du potentiel mais s’est avéré assez abscons et trop agressif à mon goût. Pourtant, ça promettait : « un personnage part à la recherche de sa conscience, dans un étrange voyage intérieur à la découverte de lui-même. Il éveille le papillon qui est dans son cœur, échange parfois des pensées avec d’autres, et observe le monde sous différents aspects. » On en ressort avec le sentiment que le propos manque de substance et de cohérence ; ça semble vouloir tout dire, et ne dit au final pas grand-chose. Les images évoquent soit des platitudes (on peint les visages de tout le monde en blanc parce que la société nous fait rentrer dans un moule gnagna ; oui, OK, mais vu comme ça… Bah, c’est plat) soit des anecdotes aux symboles graphiques tellement ambigus que le sens se perd complètement. C’est dommage ! Le graphisme avait de quoi servir un propos poétique et philosophique profond. Alors, vous me direz « peut-être qu’il faut le revoooir pour bien compreeeendre ». Justement, je ne sens pas cette profondeur qui donnerait envie d’y revenir. Ou alors, c’est que je n’étais pas réceptive à ce moment-là, allez savoir. Ce film reste tout de même intéressant à voir ; je n’en parlerais pas, sinon !

J’ai beaucoup aimé Tear Off (Peur sur la ruche) pour le graphisme très réaliste des abeilles et du grand méchant qui menace la ruche. La gestuelle de l’abeille héroïne permet de tisser une vraie empathie avec elle. C’est beau, tout beau, très beau ! J’y ai trouvé un côté Seigneur des Anneaux (quand Frodon se fait attraper par l’araignée dans la caverne (mais j’ai fait le rapprochement parce que j’ai revu la trilogie récemment… -_-)

Ice Merchants de Joao Gonzalez – un film d’animation surprenant sur le deuil-  a concouru également en compétition international.
La séance a proposé un poème mis en images : Le voyage délivré de Andrée Chedid. L’exercice n’est pas facile (les simples mises en images de textes préexistants sont rarement mémorables), mais Martin Bonnin a plutôt bien réussi à mes yeux.

 

I1 : cendres et fumée, bande de bouffons !

Un programme PAS DU TOUT pour les enfants, ce coup-ci ! Cinq courts métrages ayant leur intérêt. Je n’évoquerai que les deux qui permettent de rire d’amusement entre quelques virgules d’effrois.

Le premier : Smoke Get In Your Eyes (La Fumée pique les yeux), d’Alvin Lee, Singapour. « Après avoir fait incinérer un corps par erreur, un directeur de pompes funèbres se voit contraint de mettre en scène des funérailles avec la complicité d’une fratrie désunie », mais aussi d’un employé bienveillant et généreux au-delà de toutes limites, à l’opposé de chefs de cultes cyniques. De beaux moments de cocasserie !

Mon film favori et pinacle de la séance : My Year of Dicks, que l’on peut traduire indifféremment par « Mon année de bites » ou « Mon année de bouffons », les deux versions étant éloquentes. Une adolescente de 15 ans se donne pour objectif de perdre sa virginité dans l’année. Cœur d’artichaut à l’imaginaire riche et à l’imagination très inflammable, ses premières rencontres s’avéreront assez catastrophiques, puisque « dans la banlieue de Houston, au début des années 90, les candidats ne sont pas toujours de premier choix… » En effet, Pam va tomber sur une sacrée ribambelles de goujats. « Une comédie rétro et incisive sur la découverte de la sexualité au féminin », comme c’est écrit dans le guide complet. Je pense que nous serons nombreuses à nous y reconnaître au moins en partie, entre fantasmes érotico-romantiques frustrés, confrontation brutale à la réalité, apprentissage de la distinction entre relations saines et malsaines…

Pamela Ribon nous raconte son histoire vraie en scénarisant ce film réalisé par Sara Gunnarsdottir.

Le court métrage My Year of Dicks est actuellement nominé pour la 95e cérémonie des Oscars dans la catégorie Meilleur court métrage d’animation (source : wikipedia anglais).

Vous pouvez visionner le trailer sur Youtube.

Programmation du cinéma Le Rio

Le cinéma Le Rio est, à l’instar de La Jetée et de la Maison de la Culture, un lieu important du festival. Hors festival, Le Rio vous proposera de voir ou revoir certains courts métrages, notamment dans sa chouette programmation pour les enfants. Une séance avec animation « ciné-conte » sera proposée le 8 février (c’est dans deux jours !) et permettra de revoir Piro Piro, l’un des plus beaux courts métrages jeunesse du festival de 2022.

Je vous retrouve bientôt pour ma première vidéo de symbologie sur l’archétype du Trickster.

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